21
Buts dévoilés

 

 

Dans la petite pièce du complexe secret de Bregan D’aerthe, Catti-Brie et Entreri restèrent un long moment à se regarder, pour la première fois seuls depuis la capture de la jeune femme. Celle-ci devinait, d’après l’expression qu’il arborait, que l’assassin avait quelque chose en tête.

Il leva la main devant lui et écarta les doigts ; l’instant d’après, l’agate œil-de-chat se balançait au bout de sa chaîne en argent.

Catti-Brie observa l’objet avec curiosité, incertaine des intentions de cet homme. Il l’avait dérobé dans la poche de Jarlaxle, c’était manifeste, cependant pourquoi prendre un tel risque sur un elfe noir aussi dangereux ?

— T’es aussi prisonnier qu’moi, déduisit-elle. Y t’a enfermé ici pour suivre ses ordres.

— Je n’aime pas ce mot, répondit Entreri. Prisonnier. Il implique une certaine impuissance. Or je t’assure que ce n’est jamais mon cas.

Catti-Brie ne fut pas dupe ; il y avait dans ces mots neuf dixièmes de bravade et un autre d’espoir, néanmoins elle conserva cette pensée pour elle.

— Et que vas-tu faire quand Jarlaxle s’apercevra d’sa disparition ? demanda-t-elle.

— Je danserai à la surface à ce moment, répondit froidement l’assassin.

Catti-Brie l’observa un instant. Il lui parlait clairement, sans rien lui cacher. Mais pourquoi s’être emparé du bandeau ? Elle se posait encore cette question quand elle prit soudain peur ; Entreri avait peut-être décrété que la lumière d’étoile était préférable, ou complémentaire, à son infravision, cependant il ne lui aurait pas révélé qu’il avait l’intention de partir s’il comptait la laisser… en vie.

— T’as pas besoin d’ça, dit-elle, essayant de garder une voix ferme. Grâce à l’infravision qu’t’as reçue, t’y vois suffisamment pour retrouver ton chemin.

— Mais toi, tu en as besoin, lui expliqua l’assassin en lui lançant le bandeau.

Catti-Brie l’attrapa et le garda quelques secondes en main, le temps pour elle de mesurer les conséquences du fait de le porter.

— J’peux pas t’conduire à la surface, dit-elle, pensant que l’assassin s’était trompé sur son compte. J’ai trouvé ma route jusqu’ici qu’avec l’aide d’la panthère et du médaillon magique, qui m’ont indiqué la direction à prendre pour suivre Drizzt. (L’assassin ne broncha pas.)

» J’te dis qu’je peux pas t’sortir d’ici.

— Drizzt le peut. Je te propose un marché, que tu n’es pas en position de refuser. Je vous sors de Menzoberranzan, Drizzt et toi, et vous deux m’aidez à rejoindre la surface. Une fois là-haut, nous nous séparons. Pour toujours.

Catti-Brie médita un long moment sur cette proposition surprenante.

— Tu penses que j’vais t’faire confiance ?

Entreri ne répondit pas, c’était inutile. La jeune femme était emprisonnée dans une pièce cernée par de féroces drows ennemis, tandis que Drizzt se trouvait dans une situation encore plus fâcheuse. Quoi que le malfaisant Entreri ait à lui proposer, cela ne pouvait pas être pire.

— Et Guenhwyvar ? reprit-elle. Et mon arc ?

— J’ai récupéré l’arc et le carquois mais c’est Jarlaxle qui détient la panthère.

— Je ne partirai pas sans Guenhwyvar.

Entreri la considéra avec un œil étonné, comme s’il pensait qu’elle bluffait.

Elle jeta alors le bandeau à ses pieds, puis se hissa sur le rebord d’une petite table et croisa les bras en prenant un air de défi.

L’humain baissa les yeux sur l’objet magique, puis avisa de nouveau la prisonnière.

— Je peux vous faire sortir d’ici, assura-t-il.

— Tu t’trompes. J’parie qu’y t’faudrait mon aide et ma coopération pour évoluer ici, or j’vais pas t’l’offrir, ni moi ni Drizzt, pas sans la panthère, en tout cas.

» Et Drizzt approuvera ma décision. Guenhwyvar est notre amie à tous les deux et nous avons pas l’habitude d’nous enfuir en abandonnant nos amis !

Du bout du pied, Entreri lança le bandeau en direction de la jeune femme, qui l’attrapa de nouveau et, cette fois, le plaça sur sa tête. Sans un mot de plus, l’assassin lui enjoignit d’un geste de ne pas bouger puis, subitement, il sortit de la pièce.

L’unique garde posté à l’extérieur des quartiers privés de Jarlaxle ne manifesta que peu d’intérêt pour l’humain qui approchait, au point qu’Entreri dut presque le secouer pour attirer son attention.

— Jarlaxle, dit-il ensuite en désignant l’étrange porte ondulante.

Le soldat secoua la tête.

Entreri fit un nouveau geste en direction de l’ouverture, les yeux soudain écarquillés de surprise. Quand le garde se pencha pour voir ce qui n’allait pas, l’assassin l’attrapa par les épaules et le tira avec lui à travers le passage. Les deux hommes glissèrent instantanément dans le couloir humide. À force de contorsions, Entreri se mit à tirer le drow surpris, comme dans un combat de lutte au ralenti. Plus grand et aussi agile que cet elfe noir, l’humain parvint peu à peu à le faire avancer.

Puis ils plongèrent de l’autre côté et débouchèrent dans le bureau de Jarlaxle. Alors qu’il tentait de dégainer son épée, le drow fut renversé par un crochet du gauche de l’assassin, suivi d’une série de coups de poing, qui fut ponctuée d’un violent coup de pied sur la joue quand le soldat posa un genou à terre.

Entreri porta autant qu’il traîna le drow sur le côté de la pièce, où il le plaqua brutalement contre le mur, avant de le frapper encore à plusieurs reprises afin de s’assurer qu’il n’offrirait plus de résistance. L’elfe noir se retrouva bientôt inoffensif, à genoux, à peine conscient, les mains liées dans le dos et la bouche fermement bâillonnée. Il fut ensuite bloqué contre la paroi, le temps que son agresseur retrouve un mécanisme secret. La porte donnant sur un petit débarras ne tarda pas à s’ouvrir et Entreri y fit entrer de force son adversaire vaincu.

Il se demanda alors s’il devait ou non achever ce drow. D’un côté, s’il le tuait, il n’y aurait aucun témoin et Jarlaxle perdrait un certain temps à deviner qui avait commis ce crime. Toutefois, quelque chose retenait sa dague, quelque instinct lui dictant de procéder de façon propre, sans provoquer de perte pour Bregan D’aerthe.

Quand il trouva non seulement la statuette de Guenhwyvar mais aussi le masque magique de Catti-Brie qui l’attendaient – oui, qui l’attendaient ! – sur le bureau de Jarlaxle, Entreri se rendit compte que c’était trop facile. Il s’en empara avec prudence, guettant le moindre piège à proximité et s’assurant qu’il s’agissait bien des objets authentiques.

Il se passait quelque chose d’étrange.

Il songea alors aux allusions, pas si subtiles que cela, lâchées par le mercenaire, puis au fait que ce dernier l’avait conduit à Sorcere, lui indiquant ainsi de façon bien pratique le chemin qui menait au masque en forme d’araignée. Il plongea la main dans une de ses poches et en sortit le médaillon magique d’Alustriel, la balise qui signalait la proximité de Drizzt Do’Urden, que Jarlaxle lui avait cédé comme si de rien n’était. L’elfe noir était même allé jusqu’à lui glisser l’heure idéale pour sa tentative ; les premières heures du grand rituel, célébré à la Maison Baenre le soir même.

Dans quel but ? se demanda-t-il. Jarlaxle suivait son propre programme, qui allait visiblement à l’encontre des projets de la Maison Baenre concernant Castelmithral. Alors qu’il se tenait là, dans le bureau du mercenaire, il parut évident à Entreri que Jarlaxle s’était servi de lui comme d’un pion.

Il serra le médaillon, puis le remisa dans sa poche. Très bien, décida-t-il. Il allait se révéler un pion très efficace.

Vingt minutes plus tard, Entreri, qui, grâce au masque magique, avait pris une apparence de soldat, et Catti-Brie progressaient rapidement et en silence parmi les stalagmites sur les chemins tortueux de Menzoberranzan. Ils se dirigeaient vers le nord-est, en direction du plus haut niveau de Tier Breche et de l’Académie drow.

 

* * *

 

Il vit de nouveau les marches usées de la grande ville souterraine des nains, le cœur de Castelmithral. Il imagina l’entrée par la porte ouest, par la vallée du Gardien, et visualisa encore l’immense gouffre que l’on appelait le Défilé de Garumn.

Drizzt luttait de toutes ses forces pour voiler ces images, pour déformer la vérité à propos de Castelmithral, mais les détails étaient si nets dans son esprit ! Il avait la sensation d’y être revenu, d’y marcher librement aux côtés de Bruenor et des autres. En proie à l’hypnose du flagelleur mental, Drizzt était submergé. Il n’avait plus de barrière à élever face aux intrusions mentales de la créature de Matrone Baenre, plus de volonté à opposer à ce géant mental.

À mesure que les images lui venaient, il les sentait s’évanouir, mentalement arrachées de son esprit comme autant de nourriture pour le maudit illithid. Chaque intrusion le brûlait douloureusement et envoyait des chocs électriques sur ses connexions synaptiques.

Enfin, il sentit les tentacules insidieux de cet être hideux relâcher leur emprise sur son front, puis il s’écroula, l’esprit réduit à un mélange d’images confuses et la tête le faisant atrocement souffrir.

— Nous avons obtenu des informations aujourd’hui, dit une voix aqueuse au loin.

Obtenu des informations…

Ces mots se répercutèrent de façon sinistre en Drizzt. L’illithid et Matrone Baenre parlaient encore mais il ne les écoutait plus. Il se concentrait sur ces trois mots, terribles, et songeait à leurs conséquences.

Ses yeux lavande s’ouvrirent mais il garda la tête inclinée, tout en observant discrètement Methil, qui lui tournait le dos, à seulement une cinquantaine de centimètres de lui.

Cette créature connaissait désormais une partie de l’agencement de Castelmithral et ses intrusions répétées dans l’esprit du prisonnier lui révéleraient bientôt le complexe dans son ensemble.

Drizzt ne pouvait pas laisser cela se produire ; lentement, il serra de plus en plus fort ses chaînes.

Soudain, il frappa d’un coup de talon la tête spongieuse de l’illithid. Avant que Methil puisse s’écarter, il serra les jambes sur le cou de sa cible en une prise étouffante et commença à la secouer dans tous les sens afin de briser cette chose.

Il sentit les tentacules glisser sur sa peau et se faufiler entre ses jambes mais il lutta contre le dégoût qu’il éprouvait et se débattit sauvagement. Il devina ce qu’il allait subir quand il aperçut Vendes s’approcher sur le côté, sans pour autant se déconcentrer ; pour la sécurité de ses amis, Methil devait être tué !

Celui-ci rejeta son poids en arrière, essayant de perturber Drizzt et de lui faire lâcher sa prise ; cependant le talentueux drow accompagna le mouvement, ce qui propulsa l’illithid au sol, à demi plaqué contre le mur et à demi suspendu à la poigne ferme de l’elfe noir. Drizzt le releva et le frappa de nouveau, relâchant sa prise qui ne parvenait pas à l’étouffer. Les illithids n’étant pas des créatures imposantes d’un point de vue physique, Methil leva pitoyablement ses mains à trois doigts afin de tenter de parer les coups de pied, qui s’étaient soudain mis à pleuvoir.

Quelque chose de dur frappa Drizzt sur les côtes, ce qui lui coupa le souffle. Il ne cessa toutefois pas de frapper obstinément mais reçut un autre coup, puis un troisième, suivi d’un quatrième.

Il se laissa alors retomber et, suspendu à ses chaînes, il tenta de se recroqueviller pour protéger les zones touchées par Vendes. Il pensa que sa mort n’allait plus tarder quand il vit les yeux furieux de la redoutable Duk-Tak, emplis d’un mélange de venin, de haine et d’extase, comme si elle tenait là l’occasion de libérer cette colère perpétuelle.

Elle s’interrompit, plus tôt que Drizzt avait osé l’espérer, et s’en alla d’un pas calme, le laissant accroché à ses fers, incapable de trouver la force de se plier sur lui-même.

Methil avait rejoint Matrone Baenre, confortablement installée sur son disque dérivant, et considérait le prisonnier de ses yeux d’un blanc laiteux dépourvu de pupilles.

Drizzt avait compris que, la prochaine fois que l’illithid fouillerait dans son esprit, il s’arrangerait pour rendre la douleur encore plus intense.

— Pas de potion pour lui, ordonna Matrone Baenre à Dantrag, qui était posté, impassible, près de la porte.

Le maître d’armes suivit le regard de sa mère jusqu’à plusieurs flasques, alignées le long du mur, sur la gauche de Drizzt, puis acquiesça.

— Dobluth, dit-elle au drow rebelle, se servant d’un synonyme péjoratif de « paria » en langue drow. Le grand rituel ne sera que meilleur si nous savons que tu es ici en train de souffrir.

Elle adressa un signe de tête à Vendes, qui se retourna et lança une fléchette.

Le projectile se planta sur l’estomac de Drizzt, qui ressentit une piqûre. Peu après, il eut la sensation qu’un feu avait été allumé dans ses entrailles. Il eut des haut-le-cœur, il essaya de hurler, puis la douleur lui donna la force de se recroqueviller sur lui-même, changement de position qui ne fut guère profitable. La fléchette magique continuait à répandre ses gouttelettes de poison en lui, elle continuait à le brûler de l’intérieur.

À travers ses yeux remplis de larmes, Drizzt vit le disque dérivant glisser hors de sa cellule, Vendes et Methil suivant docilement Matrone Baenre. Dantrag, le visage dénué d’expression, resta un certain temps adossé contre le montant de la porte, puis s’approcha de Drizzt.

Celui-ci se força à ne plus crier et parvint à n’émettre que quelques grognements et gémissements, les dents serrées, une fois le maître d’armes près de lui.

— Tu n’es qu’un idiot, lui dit Dantrag. Si tes tentatives contraignent ma mère à te tuer avant que j’en aie l’occasion, je te promets de torturer et massacrer personnellement toute créature vivante qui se dira l’amie de Drizzt Do’Urden !

De nouveau avec une vivacité qui ne permit pas à Drizzt de l’apercevoir, Dantrag le frappa au visage. Le rôdeur demeura inerte quelques secondes, puis dut se replier sur lui-même quand une série d’explosions brûlantes de la fléchette empoisonnée se déclencha dans son estomac.

 

* * *

 

Hors de vue au pied de l’escalier géant qui menait à Tier Breche, Artémis Entreri essayait de son mieux de se souvenir de l’apparence de Gromph Baenre, l’Archimage de la cité. Il ne l’avait vu qu’en quelques occasions, la plupart du temps alors qu’il espionnait pour le compte de Jarlaxle. Ce dernier, qui avait un temps soupçonné ce personnage de raccourcir les nuits de Menzoberranzan en allumant les feux éternels de l’horloge de Narbondel quelques instants trop tôt, s’était alors intéressé aux projets du dangereux sorcier, raison pour laquelle il avait envoyé Entreri le surveiller.

La cape de l’assassin se changea et devint la robe flottante du sorcier, ses cheveux s’épaissirent et s’allongèrent en une longue crinière blanche, tandis que de légères rides, à peine visibles, apparaissaient autour de ses yeux.

— J’arrive pas à croire qu’tu tentes ça, lui dit Catti-Brie quand il émergea de l’ombre.

— Le masque en forme d’araignée se trouve sur le bureau de Gromph, lui répondit sèchement l’humain, qui n’était pas plus enthousiasmé que la jeune femme par ce projet. Il n’existe aucun autre moyen d’entrer dans la Maison Baenre.

— Et si Gromph est assis à son bureau ?

— Alors, toi et moi, nous serons éparpillés dans la caverne…

Entreri s’approcha de Catti-Brie, qu’il prit par la main et tira vers l’escalier.

Il comptait autant sur la chance que sur ses aptitudes. Il n’ignorait pas que Sorcere, l’école de sorcellerie, était remplie de maîtres reclus qui en général s’évitaient. Il ne pouvait qu’espérer que Gromph, malgré sa condition masculine, ait été invité au grand rituel de la Maison Baenre. Les parois de ce domaine impénétrable étant protégées des scrutations comme des téléportations, si son déguisement lui permettait de franchir les éventuelles barrières magiques dressées, il devait être en mesure d’entrer et ressortir du bureau de Gromph sans être inquiété. L’Archimage de la cité était réputé pour son caractère revêche et son humeur massacrante, si bien que personne ne s’opposait jamais à lui.

Au sommet de la volée de marches, au niveau de Tier Breche, ils aperçurent les trois structures de l’Académie drow. Sur leur droite se dressait le bâtiment pyramidal de Melee-Magthere, l’école des guerriers, tandis que devant eux s’élevait la masse impressionnante, en forme d’araignée, d’Arach-Tinilith, l’école de Lolth. Entreri se réjouit de ne pas être contraint d’entrer dans l’un de ces deux bâtiments. Melee-Magthere était un endroit sévèrement gardé où grouillaient les soldats armés, alors qu’Arach-Tinilith était protégé par les hautes prêtresses de Lolth, qui œuvraient de concert pour le bien de leur Reine Araignée. Seule la structure qui se trouvait sur la gauche, Sorcere, semblait suffisamment empreinte de mystère pour permettre d’y pénétrer.

Catti-Brie dégagea son bras et faillit s’enfuir, en proie à une terreur sans nom. Elle ne bénéficiait d’aucun camouflage et se sentait terriblement vulnérable en ce lieu. Néanmoins, elle trouva en elle-même suffisamment de courage pour ne pas résister quand Entreri l’attrapa vigoureusement de nouveau par le bras et la contraignit à accélérer l’allure.

Ils se présentèrent à l’entrée ouverte de Sorcere, où deux gardes leur bloquèrent aussitôt le passage. Quand l’un d’eux fit mine de lui poser une question, Entreri ne répondit qu’en lui assenant une gifle, espérant que la cruauté renommée de Gromph suffirait à les faire passer.

Le bluff fonctionna et les gardes reprirent leurs places, sans même oser murmurer entre eux avant que le mage se soit nettement éloigné.

Entreri se souvenait parfaitement des couloirs sinueux et parvint bientôt au mur au-delà duquel étaient situés les appartements privés de Gromph. Il inspira profondément et jeta un regard à Catti-Brie tout en se répétant en silence que si l’Archimage se trouvait derrière cette porte ils étaient à coup sûr tous les deux morts.

— Kolsen’shea orbb, murmura-t-il.

Pour son plus grand soulagement, la paroi commença à s’étirer et se déformer, jusqu’à devenir une toile d’araignée, dont les brins pivotèrent de façon à laisser apparaître une lueur bleutée à travers le trou ainsi créé. Avant de perdre son sang-froid, Entreri s’y précipita, sans lâcher Catti-Brie.

Gromph n’était pas présent.

L’assassin se dirigea vers le bureau en os de nains, puis se frotta les mains, sur lesquelles il souffla avant de tendre le bras vers le tiroir approprié. Pendant ce temps, intriguée par ce bazar de toute évidence magique, Catti-Brie fit quelques pas, observa quelques parchemins – de loin – et alla jusqu’à s’approcher d’un flacon en céramique, dont elle osa ouvrir le bouchon.

Le cœur d’Entreri bondit dans sa poitrine quand il entendit la voix de l’Archimage, puis il se détendit quand il comprit qu’elle provenait du récipient.

Catti-Brie examina le flacon, ainsi que son bouchon, d’un œil étonné, puis le referma, ce qui fit taire la voix.

— Qu’est-ce que c’était ? demanda-t-elle, ne comprenant pas un mot de la langue drow.

— Je n’en sais rien, lui répondit durement Entreri. Ne touche à rien !

La jeune femme haussa les épaules et laissa l’assassin se retourner vers le bureau. Il essayait de s’assurer d’être capable de prononcer correctement le mot de passe qui ouvrait le tiroir. Il se remémora sa conversation avec Jarlaxle, quand ce dernier lui avait donné ce sésame. Le mercenaire avait-il parlé franchement ou cela faisait-il partie de son jeucompliqué ? Jarlaxle l’avait-il poussé à se rendre en cet endroit pour qu’il prononce un mot de passe erroné, ouvre le tiroir et détruise ainsi la moitié de Sorcere en même temps que lui-même ? Il imagina même que le drow avait pu placer une réplique du masque dans le tiroir avant de s’arranger pour le faire venir ici et faire exploser les quartiers bien protégés de Gromph, ce qui détruirait ainsi toute preuve.

Entreri chassa ces pensées perturbantes. Il s’était engagé sur cette voie, il s’était convaincu que sa tentative de libérer Drizzt faisait d’une façon ou d’une autre partie de la trame des plans d’ensemble de Jarlaxle, quels qu’ils puissent être. Il ne pouvait pas céder à ses peurs à cet instant. Il articula le mot et ouvrit le tiroir.

Le masque en forme d’araignée l’attendait.

Il s’en saisit et se retourna vers Catti-Brie, qui avait rempli le haut d’un petit sablier de sable blanc et fin, qu’elle regardait couler. Entreri jaillit du bureau en os de nains et traversa en un éclair la pièce avant d’écarter l’objet.

Catti-Brie le gratifia d’un regard étonné.

— Je passais le temps, lui expliqua-t-elle sans s’énerver.

— Ce n’est pas une horloge ! lui répondit avec brusquerie l’assassin, qui renversa l’objet et en ôta soigneusement le sable, qu’il replaça dans son sachet avant de refermer celui-ci. C’est un explosif. Quand le sable a fini de s’écouler, tout le quartier sombre dans les flammes ! Ne touche à rien ! Gromph ne saura même pas que nous sommes passés si tout reste en ordre. (Il embrassa le fouillis de la pièce du regard.) Ou en tout cas, dans le bon désordre. Il n’était même pas ici quand Jarlaxle a rapporté le masque.

Catti-Brie hocha la tête, visiblement sincèrement honteuse, ce qui n’était en réalité qu’une façade. Elle avait soupçonné la nature générale – à défaut d’être capable de la préciser – du sablier depuis le début et n’aurait pas laissé le sable s’écouler jusqu’au bout. Elle n’avait lancé ce mécanisme que pour obtenir la confirmation de ses pensées de la part de l’assassin expérimenté.

Ils sortirent tous les deux sans plus tarder de la pièce du sorcier, puis quittèrent Sorcere. Catti-Brie ne révéla pas qu’elle avait glissé dans une poche de sa ceinture plusieurs de ces dangereux sabliers, ainsi que les sachets de sable explosif correspondants.

Nuit sans étoiles
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